23 livres à lire sur l’Antiquité et la mythologie

Pour ce printemps 2025, je vous emmène faire un petit tour d’horizon de ma pile à lire spéciale « Antiquité » qui attend gentiment dans ma bibliothèque. Tous ces livres ont pour point commun d’être des romans de littérature moderne d’inspiration antique. N’hésitez pas à me dire en commentaire si vous avez déjà lu l’un de ces livres et quel a été votre avis !

♥ La Mythologie

Mythos de Stefen Fry
Les Douze travaux d’Hercule de Guy Rachet
Odysseus de Valerio Manfredi
L’Obscure clarté de l’air de David Vann
Le Silence des vaincues de Pat Barker
Electre de Jenifer Saint
Pénélope, reine d’Ithaque de Claire North
L’Odysséa de Marilu Olivia
Monologue de la louve de Gilles Leroy
10° Perséphone de Benjamin Carteret

♥ La Fantaisie

11° Lore d’Alexandra Bracken
12° Prince captif de C.S. Pacat
13° Ilium de Dan Simmons
14° La déesse des marguerites et des boutons d’or de Martin Millar

♥ L’Histoire

15° Mémoires d’Agrippine de Pierre Grimal
16° Acté d’Alexandre Dumas
17° Néropolis d’Hubert Monteilhet
18° Spartacus d’Howard Fast
19° L’étreinte de Némésis de Steven Saylor
20° Empire d’Alberto Angela
21° Rome, mon histoire de Bertrand Ferrier
22° Marcus Aper d’Anne de Leseleuc

♥ La Poésie

23° Les nouveaux anciens de Kate Tempest


♥ La Mythologie

Mythos de Stefen Fry ()

Mythos de Stephen Fry


. Date de publication : 2022
. Edition : Calmann-Levy
. Nombre de pages : 368 p.

Après avoir picoré quelques extraits(*) en librairie qui m’ont fait franchement rire, j’ai décidé de me laisser tenter par cette revisite de la mythologie grecque. Une fois le livre dans mon sac, j’étais curieuse de savoir qui pouvait bien être ce bonhomme qui avait réussi à me décrocher quelques sourires. Après recherche, il s’avère que Stefen Fry est un comédien et réalisateur britannique, également écrivain et humoriste, et qu’il est un féru de la mythologie grecque. Ceci explique cela.

” Saviez-vous que le fils d’Apollon a failli brûler la terre en jouant avec le char solaire de son divin père ? Que Psyché est entourée de deux vilaines belles-sœurs prêtes à tout pour ruiner son histoire d’amour avec Éros ? Ou que Sisyphe a passé les menottes à la Mort en personne ? La mythologie grecque racontée par le facétieux Stephen Fry est un délice. D’un ton décalé et piquant, mais toujours avec la rigueur et l’infinie tendresse qui le caractérisent, l’artiste anglais aux multiples talents capture ces mythes extraordinaires dont la modernité vous frappe à chaque page.”

Les Douze Travaux d’Hercule de Guy Rachet ()

Les Douze travaux d'Hercule de Guy Rachet. Date de publication : 1993
. Edition : Gallimard
. Nombre de pages : 384 p.

Le sujet mythologique abordé dans ce livre acheté d’occasion est ici très clair. Je ne demande qu’à voir la façon dont l’auteur que je n’ai jamais lu s’est approprié la figure d’Hercule.

“Qui ne connaît ou ne se souvient d’Héraclès, l’Hercule des Romains, et de ses fameux douze travaux ? De tous les personnages mythiques de la Grèce, Héraclès est celui à qui les Anciens ont attribué le plus d’aventures. Car ce défenseur des faibles, ce guerrier de naissance divine – n’était-il pas fils de Zeus, le dieu suprême de l’Olympe, et d’Alcmène, considérée comme la plus belle des mortelles ? -, ce conquérant des royaumes qui allait d’exil en exil et ne trouvait jamais de lieu où se fixer, cet éternel errant était aussi un grand amoureux au puissant tempérament. Aucune œuvre antique ni aucun roman moderne n’ont jamais été consacrés dans leur ensemble au personnage et à sa geste. Avec une écriture où se mêlent l’humour et le lyrisme, un rythme épique et haletant, Guy Rachet nous fait revivre l’extraordinaire odyssée de ce demi-dieu en quête d’immortalité et nous entraîne dans le monde merveilleux d’une époque lointaine…”

3° Odysseus de Valerio Manfredi ()

 

. Date de publication : 2014
. Edition : J.-C. Lattès
. Nombre de pages : 405 p.

Texte

« Voici le grand roman de l’un des plus célèbres personnages de l’histoire littéraire, Odysseus (Ulysse).
Odysseus, dont le nom grec signifie « qui est plein de colère », fait ses premiers voyages avec son père Laerte, l’un des Argonautes. Lors d’une terrible battue au sanglier, il manque de perdre la vie, découvrant simultanément combien comptent le courage et la prudence. Les années passent.
Devenu jeune homme, Odysseus se rend à Sparte où il croise pour la première fois Hélène. Celle-ci s’éprend de lui, mais il ne veut pas d’elle : celle qu’il aime est Pénélope.
Après leur mariage, Laerte, admiratif de la sagesse de son fils, lui cède le pouvoir. Odysseus devient roi d’Ithaque. Hélas, la paix sera de courte durée : Pâris a ravi Hélène, Ménélas exige sa restitution, en vain. Le siège de Troie commence, et avec lui, la guerre.
Sur le fil de L’Iliade, Valerio Manfredi brosse le portrait d’un héros moderne et saisissant, qui a fait de l’intelligence l’arme humaine la plus puissante. »

L’Obscure Clarté de l’air de David Vann ()

L'Obscure clarté de l'air, un roman sur Médée de David Vann
. Date de publication : 2019
. Edition : Gallmeister
. Nombre de pages : 240 p.

Je venais alors de finir Circé de Madeline Miller, encore toute nostalgique et regrettant que l’histoire ait déjà pris fin, quand je suis tombée sur cette couverture. Je comprends qu’il s’agit là de l’histoire de Médée. J’achète donc le livre, toute satisfaite de pouvoir étancher ma soif de mythologie en poursuivant les aventures d’une autre héroïne. Une fois de retour chez moi, j’ai cependant vite déchanté quand j’ai tenté de lire les premières pages qui m’ont paru incompréhensibles : le style haché de l’auteur repose uniquement sur une succession d’impressions, de couleurs et de sensations sans dire jamais clairement les choses. Le style m’a semblé très lourd et être un obstacle à la compréhension. Je l’ai donc pour l’instant mis de côté en espérant néanmoins y retourner avec une meilleure disposition d’esprit.

“Née pour détruire les rois, née pour remodeler le monde, née pour horrifier et briser et recréer, née pour endurer et n’être jamais effacée . Ainsi est Médée, femme libre et enchanteresse, qui brise tous les tabous pour maîtriser son destin. Magicienne impitoyable assoiffée de vengeance ou princesse amoureuse trahie par son mari Jason ? Ce portrait d’une femme exceptionnelle, qui s’élève contre la loi des hommes, allie noirceur et passion dévorante. David Vann offre une relecture moderne du mythe originel et fondateur de la civilisation occidentale dans toute sa complexe et terrifiante beauté.”

Le Silence des vaincues de Pat Barker ()

Le Silence des vaincues, un roman sur les femmes de la guerre de Troie par Pat Barker


. Date de publication : 2022
. Edition : J’ai Lu
. Nombre de pages : 448 p.

C’est ma mère qui m’a fait découvrir Pat Barker dont l’œuvre, Les Exilées de Troie, était proposée dans les suggestions de lectures d’un magazine. Mais avant ce roman, l’écrivaine américaine avait écrit un 1er tome intitulé Le Silence des vaincues qui venait de sortir en format poche. L’histoire ? Celle de la guerre de Troie, mais celle vécue par les femmes. Une lecture que je souhaiterais mettre en regard avec certaines œuvres antiques dont le sujet porte lui aussi sur la guerre de Troie vue par les femmes. Je pense à quelques tragédies d’Euripide (Andromaque, Hélène, Les Troyennes) ou encore à certaines lettres des Héroïdes d’Ovide.

“En quelques heures, la belle Briséis, reine de Lyrnessos, a vu sa vie s’effondrer en même temps que les murs de sa cité sous les assauts des Grecs. Son mari et ses frères ont été massacrés, et elle est devenue l’esclave, le trophée parmi d’autres, de l’homme qui l’a conquise : le divin Achille, dont les générations futures chanteront les exploits. Briséis doit alors choisir : se laisser mourir, ou survivre et raconter son histoire. L’histoire de la femme qui a fait basculer la guerre de Troie. Avec elle, après trois mille ans de silence, ce sont les voix de toutes les femmes rendues muettes par l’histoire qui s’élèvent. Esclaves, prostituées, guérisseuses, effacées au profit des faits d’armes des guerriers. Avec une précision remarquable et un style époustouflant, Pat Barker fait naître sous nos yeux une Iliade féminine magistrale.

Electre de Jennifer Saint ()

Electre, un roman mythologique de Jennifer Saint. Date de publication : 2024
. Edition : Sabran
. Nombre de pages : 352 p.

J’avais lu Ariane de cette même autrice que j’avais beaucoup aimé. J’en ai d’ailleurs fait une petite chronique sur ce blog et j’en ai également parlé dans ma vidéo Bilan Lectures 2024.

La redécouverte d’Electre sera l’occasion pour moi de me plonger dans les pièces antiques. Je pense à la tragédie de Sophocle, Electre, mais également à L’Orestie d’Eschyle, une trilogie de 3 tragédies : Agamemnon, Les Choéphores et Les Euménides.

Trois femmes prisonnières d’une malédiction arracheront leur liberté aux dieux. La famille des Atrides est maudite. C’est une lignée corrompue par un cycle ininterrompu de violence, où la soif de vengeance s’est transmise de génération en génération.

Clytemnestre est la femme d’Agamemnon. Son espoir de briser le sort qui pèse sur les Atrides est fracassé lorsque sa soeur, Hélène, s’enfuit à Troie. Son mari lève alors la plus grande armée au monde, prêt à triompher quel qu’en soit le prix.

Cassandre est princesse de Troie. Victime du courroux d’Apollon, elle voit l’avenir sans que l’on accorde le moindre crédit à ses prophéties. Elle seule sait que la cité légendaire tombera.

Électre , la plus jeune fille de Clytemnestre et d’Agamemnon, grandit dans l’ombre d’un père absent dont elle fantasme la grandeur. Rongée de solitude, elle devra faire face au poids de son terrible héritage.

Proies tragiques des dieux et des hommes, ces héroïnes inoubliables incarnent les différentes facettes d’une féminité en lutte.”

Pénélope, reine d’Ithaque de Claire North ()

Pénélope, reine d'Ithaque de Claire North. Date de publication : 2022
. Edition : Hauteville
. Nombre de pages : 512 p.

J’aime beaucoup dans L’Odyssée les retrouvailles de Pénélope avec Ulysse dans les bras de qui elle ne se jette pas et qu’elle va, d’une certaine façon mettre au défi. J’avais lu le court récit L’Odyssée de Pénélope de Margaret Atwood, que j’avais trouvé intéressant sans l’avoir cependant beaucoup aimé en raison de l’amertume du personnage. A quelques réserves près, The Readler avait plutôt aimé le roman de Claire North. Il s’agit du 1er tome du cycle Le Chant des déesses. Le 2e tome Le Palais d’Ulysse et le dernière tome de la trilogie La Dernière Reine de Grèce sont déjà sortis.

“Au-delà des rivages d’Ithaque, les caprices des dieux dictent les guerres des hommes. Mais sur l’île, ce sont les choix des femmes abandonnées – et de leurs déesses – qui changeront le cours du monde.

Le roi Ulysse est parti depuis de nombreuses années en guerre contre Troie, emmenant tous les hommes en âge de combattre de l’île d’Ithaque. Pénélope, sa femme, l’attend avec patience et dirige le royaume. Mais lorsque des rumeurs circulent sur la mort de son mari, les prétendants commencent à frapper à sa porte. Or, aucun homme n’est assez puissant pour revendiquer le trône vide d’Ulysse. Si Pénélope choisit l’un d’entre eux, Ithaque plongera dans une guerre civile sanglante. Seule la ruse et son réseau d’espionnes lui permettront de maintenir l’équilibre délicat du pouvoir nécessaire à la survie du royaume. À Ithaque, tout le monde surveille tout le monde et il n’y a pas un coin du palais où l’intrigue ne règne pas en maître.

Le plus grand pouvoir des femmes est celui dont elles s’emparent en secret.”

L’Odysséa de Marilu Olivia ()

L'Odysséa racontée par Pénélope, Circé, Clypso et les autres par Marilu Oliva. Date de publication : 2022
. Edition : Michel Lafon
. Nombre de pages : 237 p.

Dans la veine de toute cette mode littéraire autour de la reprise des figures féminines de la mythologie, ce titre avait d’autant plus éveillé mon intérêt qu’il s’agit là de l’œuvre d’une autrice italienne. L’engouement est vite retombé quand j’ai lu des avis très mitigés à son sujet et les premières pages du livre dans lesquelles quelques détails m’ont chiffonnée…

“L’Odysséa ne raconte pas le voyage d’un homme mais les histoires d’amour de plusieurs femmes.
Il y a d’abord Calypso, prise à son propre piège de séduction, qui tombe amoureuse d’Ulysse mais doit se résoudre à le laisser partir… Il y a les sirènes qui ont juré sa perte et sa destruction, et Euryclée, la nourrice qui l’a élevé et l’aime tendrement. Il y a Nausicaa, la séductrice ingénue mais puissante, qui ose à peine le toucher. Il y a Circé, la dominatrice, qui n’a que mépris pour les hommes, jusqu’à ce qu’elle le rencontre. Puis il y a Pénélope, l’unique. L’épouse qui, loin d’attendre passivement le retour de son mari, fait montre d’autant de ruse, de pugnacité et de loyauté que lui.
Pour la première fois, ce sont elles qui chantent les pérégrinations du héros mythique, faisant basculer le point de vue d’une voix masculine unique à une polyphonie féminine.
En contrepoint de leurs récits s’élève la voix d’Athéna, dea ex machina, qui conseille et encourage Ulysse et Télémaque, allégorie de la femme qui se cache derrière chaque grand homme.”

Monologue de la Louve de Gilles Leroy ()

Monologue de la Louve, un roman sur Hécube par Gilles Leroy. Date de publication : 2024
. Edition : JC Lattès
. Nombre de pages : 288 p.

Ce roman me fait très envie ! Il fait d’ailleurs partie de mes objectifs de lectures de 2025. Le monologue de la Louve est, en fait, le monologue d’Hécube, reine de Troie, un personnage mythologique que j’aime beaucoup depuis que j’ai lu la tragédie Hécube d’Euripide (que je vous conseille grandement si vous souhaitez découvrir une pièce antique !). J’en parle un peu plus longuement dans ma vidéo Mes envies livresques de 2025.

“Hécube, la reine de Troie, voit sa cité détruite, ses enfants massacrés. Faite captive après la guerre, elle est condamnée à devenir l’esclave de son ennemi Ulysse. Une légende dit que, pour échapper à l’humiliation, elle se change en louve. Ce Monologue puissant, incantatoire, raconte sa métamorphose.”

10° Perséphone de Benjamin Carteret ()

. Date de publication : 2024
. Edition : Livre de Poche
. Nombre de pages : 672 p.

La figure de Perséphone est très abondamment reprise dans la production littéraire d’aujourd’hui, notamment dans des réécritures érotiques (et je pense à la dark romantasy Hadès et Perséphone). Je suis très curieuse de voir comment cet auteur français s’empare de cette figure mythologique.

« Dans la monarchie divine de Ciel et l’Ordre de Zeus, Koré, jeune déesse sans pouvoir, grandit à l’ombre de sa puissante famille. C’est loin de l’Olympe, auprès des mortels auxquels sa mère Déméter enseigne l’agriculture, que son pouvoir se révèle enfin. Koré devient Printemps, Feu de Terre, et l’héritière d’une lignée de déesses gardiennes de l’ordre ancestral. Mais avec cette révélation jaillit la contestation, le rejet d’un ordre oppressant et patriarcal.
Koré, forte de son nouveau pouvoir, déclare la guerre à Ciel avant de se faire enlever par son oncle Hadès et de devenir sa captive dans l’autre monde. Tandis que l’amour éclot dans les ténèbres, l’hiver de Déméter endeuillée succède pour la première fois au printemps. La famine qu’elle libère menace la race des hommes et, par-là, celle des dieux. Partout, la mère cherche sa fille perdue mais Koré n’existe plus.
Dans le coeur de Terre naît Perséphone. »

♥ La Fantaisie

11° Lore d’Alexandra Bracken ()

Lore, un roman d'Alexandra Bracken. Date de publication : 2023
. Edition : J’ai Lu
. Nombre de pages : 704 p.

Les avis de lecture semblent s’accorder sur le fait que ce mélange détonnant de mythologie grecque et d’Hunger Games fonctionne bien. Certains pointent un excès d’action au détriment de l’analyse psychologique des personnages.

Parce qu’ils ont défié Zeus, les dieux de l’Olympe doivent se soumettre à l’Agôn : tous les sept ans, pendant sept jours, ils descendent sur Terre et perdent leur immortalité. Les descendants des lignées de héros peuvent alors les tuer, s’approprier leurs pouvoirs et devenir des dieux à leur tour… jusqu’au prochain Agôn. New York, de nos jours. Lore, dernière survivante des Perséides après que son clan a été anéanti par une famille rivale, essaie d’oublier ces événements traumatiques. Mais un soir, elle trouve sur le pas de sa porte une femme ensanglantée qui prétend s’appeler Athéna… La chasse aux dieux est ouverte !

12° Prince captif de C.S. Pacat (L’intégrale) ()

Prince Captif, de C.S. Pacat. Date de publication : 2017
. Edition : Bragelonne
. Nombre de pages : 640 p.

Repéré sur la chaîne YouTube Les mots de l’imaginaire.

“IL DEVAIT ÊTRE ROI, IL EST DEVENU ESCLAVE.

Damen est un héros pour son peuple et le légitime héritier du trône d’Akielos. Mais lorsque son demi-frère s’empare du pouvoir, Damen est capturé, dépouillé de son identité et offert comme esclave de plaisirs au prince d’un royaume ennemi.

Beau, manipulateur et mortellement dangereux, son nouveau maître, le prince Laurent, incarne ce qui se fait de pire à Vère. Mais dans la toile mortelle de la politique vérétienne, les apparences sont trompeuses. Pris dans les manigances de la cour, Damen doit s’allier à Laurent pour sa survie et celle de son royaume. Sans jamais oublier une règle vitale : cacher sa véritable identité à tout prix. Car l’homme dont il a besoin est celui qui a le plus de raisons de le haïr…”

13° Ilium de Dan Simmons ()

Ilium de Dan Simmons. Date de publication : 2007
. Edition : Pocket
. Nombre de pages : 912 p.

J’ai fait une première tentative, il y a quelques années. Cette fantasy SF

“Les dieux de l’Olympe vivent sur Mars et se déplacent librement dans le temps et l’espace grâce à leurs pouvoirs quantiques. Leur plus grand plaisir, c’est la guerre de Troie. Pour y mettre un peu plus de piment, ils envoient des érudits terriens modifier les événements à leur gré, en gardant toutefois le récit d’Homère comme référence. Mais en orbite autour de Mars, de petits observateurs surveillent les jeux divins…

” Avec cette œuvre, Dan Simmons redéfinit les canons de la SF au XXIe siècle. ” Peter F. Hamilton

” Il y a tant d’idées dans Ilium qu’elles pourraient servir à une génération d’écrivains. ” Philippe Curval – Le Magazine littéraire

Cet ouvrage a reçu le prix Locus 2004″

14° La déesse des marguerites et des boutons d’or de Martin Millar ()

La Déesse des marguerites et des boutons d'or, un roman mettant en scène Aristophane de Martin Millar. Date de publication : 2018
. Edition : Folio SF
. Nombre de pages : 288 p.

Repéré sur la chaîne YouTube de Barroco Lectures, ce roman de fantasy semble très original ! On y suit l’histoire d’Aristophane qui cherche à mettre en scène sa comédie La Paix.

Mon objectif serait de lire d’abord le 1er volume des Comédies d’Aristophane qui se clôt justement par La Paix avant de prolonger ma découverte complète de son oeuvre par la lecture de ce roman. Ce roman fait partie de mes objectifs Lectures 2025. Vous pouvez lire mes pitchs des oeuvres du 2e volume ici.

“Athènes, 421 av. J.-C. Cela fait des années que Sparte et Athènes se font la guerre. Dans les deux camps, le peuple n’aspire qu’à une seule chose : la paix. C’est d’ailleurs le titre de la prochaine pièce d’Aristophane, avec laquelle il compte bien remporter le premier prix aux prochaines Dionysies. Mais les répétitions sont catastrophiques, et le dramaturge court au désastre. Pourtant, beaucoup pensent, y compris parmi les dieux, que du succès de la pièce pourrait dépendre l’issue des négociations en cours entre les belligérants. Dans La déesse des marguerites et des boutons d’or, Martin Millar fait défiler, pour notre plus grand plaisir, personnages réels et fictifs, dieux, nymphes et autres amazones. Un mélange détonant, puissamment satirique.”

♥ L’Histoire

15° Mémoires d’Agrippine de Pierre Grimal ()

Mémoires d'Agrippine de Pierre Grimal


. Date de publication : 1994
. Edition : Le Livre de Poche
. Nombre de pages : 368 p.

Je l’avais repéré sur l’étal d’une librairie de musée, celui de Saint-Rémy-de-Provence où j’avais visité le site archéologique de Glanum. Bien que l’histoire m’intéresse, je suis un peu sceptique sur son auteur. Pierre Grimal est un nom familier aux étudiants de lettres classiques, puisqu’il s’agit d’un spécialiste de la civilisation romaine. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai du mal à me dire qu’il puisse avoir des talents de romancier. J’espère être détrompée !

“Arrière-petite-fille d’Auguste, sœur de Caligula, nièce puis épouse de Claude, mère de Néron, Agrippine est assurément une figure emblématique des coulisses du pouvoir dans la Rome impériale. Sous la forme de mémoires fictives, P. Grimal fait revivre cette femme d’exception.”

16° Acté d’Alexandre Dumas ()

Acté, un roman historique d'Alexandre Dumas. Date de publication : 1839
. Edition : Arléa
. Nombre de pages : 223 p.

J’ai quelques appréhensions à commencer ce livre qui est un des tous premiers romans historiques de Dumas parce que j’ai déjà été déçu par cet auteur (alors que j’ai par ailleurs adoré d’autres de ses romans). Les premières lignes n’auguraient rien de bon en termes de style ou de souffle romanesque… Il se peut que je le parcoure en diagonale.

“A Corinthe, en mai 57 après Jésus-Christ, de nombreux athlètes convergent de toutes les contrées de l’Empire romain pour disputer les jeux. Néméens. Acté, une jeune Corinthienne, s’éprend d’un des concurrents, le Romain Lucius, qui remporte les trois épreuves des jeux. Elle, le suit à Rome, et découvre qu’il n’est autre que l’empereur Néron. Les horreurs et les crimes qui jalonnent le règne du tyran poussent Acté à se réfugier auprès des chrétiens, dans les catacombes. Là, elle rencontre l’apôtre Paul, et décide de se faire chrétienne. Après son baptême, arrêtée et condamnée à être exposée aux bêtes dans le cirque, elle est épargnée, et libérée. Après la révolte de Rome contre Néron et le suicide de l’empereur, Acté la fidèle fleurira la tombe de son amant jusqu’à sa mort, quinze ans plus tard. Premier roman historique d’Alexandre Dumas, Acté est l’un des deux livres que l’auteur a situés dans l’Antiquité, et l’on verra que, déjà, ses personnages sont plus vivants, plus vrais que leurs modèles historiques. Henryk Sienkiewicz a d’ailleurs reconnu qu’il avait puisé dans la fresque de Dumas pour écrire son best seller “Quo Vadis”, et Ernest Renan s’en est inspiré pour rédiger son ouvrage sur le règne de Néron, l’Antéchrist.”

17° Néropolis d’Hubert Monteilhet ()

Neropolis, un roman sur l'empereur Néron par Hubert Monteilhet. Date de publication : 1998
. Edition : France Loisir
. Nombre de pages : 739 p.

Voilà un roman qui m’effraie ! C’est une belle brique débordant d’érudition et les quelques extraits que j’avais picorés semblaient très denses avec beaucoup de détails qui ne rendaient pas la lecture très fluide.

Ce roman des temps néroniens est un livre incontournable, une page d’histoire vraie et à jamais inoubliable pour qui veut pénétrer la Rome décadente et déchirée du premier siècle après Jésus-Christ ; connaître Néron et son règne, comprendre une époque charnière où l’empereur rêvait de baptiser sa ville “Néropolis” tandis que naissait le mythe chrétien de la cité vertueuse. En une profonde plongée dans un monde baroque et passionné, le kaléidoscope tourbillonnant de l’histoire se met en mouvement : tueries de l’amphithéâtre, brutalité des courses de chars, apogée des débauches, émancipation provocatrice des femmes, étranges soldats du Christ spéculant sur l’Apocalypse… Enfin, les Romains, tels qu’ils furent, saisis sur le vif par un historien rigoureux et minutieux, qui est aussi un romancier plein d’humour, amateur de métaphysique troublante !

18° Spartacus de Howard Fast ()

Spartacus, un roman d'Howard Fast
. Date de publication : 1951
. Edition : Gallmeister
. Nombre de pages : 446 p.

Spartacus… Voilà une grande figure mi-légendaire, mi-historique qui soulève de nombreux débats parmi les historiens et dont s’empare un auteur américain pris dans les tourments du maccarthysme. Comme bien souvent dans les péplums américains, l’auteur Howard Fast récupère une figure légendaire de l’histoire antique pour mieux parler de ce qui agite l’Amérique.

“Printemps 71 avant Jésus-Christ.
La voie Appienne de Rome à Capoue est jalonnée de suppliciés sur leurs croix. Ce sont les derniers vaincus de la grande révolte des esclaves conduite par Spartacus, qui a fait trembler la puissante République sur ses fondations. Voici le roman de Spartacus. Esclave, fils et petit-fils d’esclaves, racheté puis entraîné comme gladiateur pour distraire dans le sang l’aristocratie romaine éprise des combats de l’arène, il fut le meneur de la dernière et plus grande rébellion servile que Rome ait connue. L’Histoire n’enregistre guère le visage et la parole des vaincus quand ce ne sont ni des généraux ni des chefs d’Etat.
Pourtant, son nom est resté le symbole de tous les combats pour la liberté. En 1960, Stanley Kubrick en a fait le film que nous connaissons, avec Kirk Douglas dans le rôle-titre.”

19° L’étreinte de Némésis de Steven Saylor ()

L'étreinte de Némésis, un roman policier historique de Steven Saylor. Date de publication : 2019
. Edition : Gallmeister
. Nombre de pages : 240 p.

La série policière historique Les Mystères de Rome de l’américain Steven Saylor nous avait été conseillée par une de mes professeures de latin à la fac. J’ai lu le 1er tome que j’avais bien aimé, voici ma petite chronique du roman Du Sang sur Rome. On y suit les enquêtes de Gordien, un Sherlock Holmes à la sauce antique.

Même si je ne suis pas une grande adepte des enquêtes policières, je ne suis pas contre continuer à suivre les affaires de Gordien qui est amené à rencontrer de grandes figures politiques (dans le 1er tome, on assiste aux débuts de Cicéron en tant qu’avocat !).

“Un maître a été sauvagement assassiné. Deux de ses esclaves sont en fuite. Sont-ils allés rejoindre Spartacus, qui vient de soulever les esclaves ? Simple ! Trop simple selon Gordien, le privé teigneux qui hante la Rome antique, depuis ses bas-fonds jusqu’aux villas patriciennes des hauteurs de la cité impériale. Pour résoudre l’affaire, il lui faudra toute son astuce et l’aide de son fils adoptif, Eco. Au rythme haletant de son enquête, nous visitons les villas, assistons à des banquets et aux jeux du cirque, consultons la sybille de Cumes. Pour faire triompher Thémis, Gordien ira jusqu’à s’approcher d’une porte de l’Hadès, le monde des Morts. C’est à ce prix qu’il deviendra la bras de Némesis, la déesse du Châtiment.”

20° Empire, Un fabuleux voyage chez les Romains avec un sesterce en poche d’Alberto Angela ()

Empire, un roman documentaire d'Alberto Angela. Date de publication : 2019
. Edition : Gallmeister
. Nombre de pages : 240 p.

J’avais adoré son roman documentaire Une journée dans la Rome antique ! Alberto Angela, paléontologue, vulgarisateur scientifique et présentateur télé en Italie, renouvelle l’expérience avec Empire.

On sort des frontières de Rome pour parcourir l’Empire romain, en long, en large et en travers, en suivant les tribulations d’une pièce de monnaie qui passe de main en main. De ma précédente lecture, m’est resté en mémoire le don d’Alberto Angela de faire une peinture vivante de temps disparus dans un style agréable.

“Entre 115 et 177 ap. J.C., une pièce d’un sesterce passe de main en main à travers tout l’empire romain occidental. L’auteur imagine de nous faire rencontrer tous ceux et celles qui ont tenu cette pièce et nous fait voyager à travers les classes sociales et les types humains divers de cet empire antique. Sa fiction s’appuie toujours sur des témoignages d’archéologues et se donne toujours un objectif à la fois ludique et instructif.
Alberto Angela, paléontologue de formation, conçoit et présente des émissions culturelles pour la télévision italienne. Ses vulgarisations sur l’Antiquité ont beaucoup de succès.”

21° Rome, mon histoire de Bertrand Ferrier ()

 

. Date de publication : 2004
. Edition : Hachette
. Nombre de pages : 310 p.

Dans ce récit jeunesse, Rome s’adresse directement à nous pour raconter son histoire de sa naissance à la fin de l’Empire romain. La narration a l’air enlevée et pleine d’humour. Je me rappelle l’avoir gardé tout ce temps en me disant que j’en ferais forcément usage en tant que professeure de latin.

« Depuis des millénaires, tout le monde croit savoir ce qui est arrivé à Rome, “la ville éternelle”. Mais qui dit la vérité? Pour la première fois, Rome raconte elle-même son histoire. La légende de sa naissance, les traces des premiers Romains, les grands événements, les guerres, les prises de pouvoir… On suit avec jubilation la fabuleuse aventure de l’Empire. »

22° Marcus Aper d’Anne de Leseleuc ()

. Date de publication : 1992
. Edition : 10/18, Grands détectives
. Nombre de pages : 210 p.

Acheté d’occasion avec deux autres tomes (Marcus Aper et Laureolus, Les calendes de septembre), ce titre m’a attiré parce qu’il met en scène un avocat gaulois qui exerce un temps à Rome avant de revenir au pays où il mettra à profit ses talents d’enquêteurs.

« En l’an 74 de notre ère, Marcus Aper, fameux avocat de la Rome de Vespasien, part en villégiature pour sa Gaule natale. A peine arrivé dans la demeure de son ami Quintus Solem, il se trouve confronté à un premier meurtre, puis à un second. Ce lointain cousin d’Astérix, devant le laxisme de l’édile, décide de mener l’enquête… Cette première aventure du plus original (depuis le Juge Ti) de nos ” Grands Détectives ” est racontée par une historienne de qualité qui sait allier la patte romanesque des meilleures reines du crime à la reproduction vivante de la vie quotidienne de nos ancêtres les Gaulois. »

♥ La Poésie

23° Les nouveaux anciens, Kate Tempest ()

Les nouveaux anciens, un poème oral de Kate Tempest. Date de publication : 2017
. Edition : L’Arche
. Nombre de pages : 72 p.

Il s’agit ici d’un poème à lire à haute voix, c’est du moins ce qu’il nous est suggéré de faire en introduction. Les premières pages me font penser à la série Netflix Kaos qui imagine ce que seraient les dieux s’ils vivaient à l’époque moderne. Ça fait des années qu’il traîne dans ma bibliothèque alors qu’il semble très rapide à lire !

Fable urbaine contemporaine, entre rap, poésie et épopée dramatique, Les nouveaux anciens renoue avec la ballade antique en embrassant toutes ces formes dans une magistrale et puissante unité. Kevin, Jane, Mary, Brian, Thomas et Clive, héros ordinaires, dieux d’aujourd’hui, ignorent tout de leurs liens de parenté et s’illustrent par leurs espoirs et désillusions, jalousie, bravoure et trivialité. Les anciens mythes résonnent dans ces vies désenchantées, où surgit la beauté de l’humain loin de l’indifférence cynique du monde contemporain.
« Sans doute l’orfèvre de la langue la plus importante de sa génération ». Le Spiegel
« Une ballade bouleversante sur la précarité du quotidien, avec des rimes saccadées et des lignes de basse saturées. À lire à voix haute absolument ! » Deutschlandfunk Kultur”

Le Conte d’Amour et Psyché dans la saison 3 de La Chronique des Bridgerton

L’équipe de tournage de la série Netflix à succès, La Chronique des Bridgerton, mène un véritable travail artistique tant dans ses costumes et décors que dans ses partis pris, mais aussi… dans ses allusions littéraires.

Dans l’épisode 4 de la saison 3 de La Chronique des Bridgerton, est glissée une très belle allusion littéraire qui aura sans doute échappé à beaucoup tout simplement parce que l’œuvre est très peu connue (mais mériterait vraiment de l’être). Il s’agit d’une allusion au Conte d’Amour et Psyché, une très belle histoire d’amour du IIe siècle racontée dans Les Métamorphoses ou l’âne d’or d’Apulée.

Un intermède mythologique… et symbolique

Peut-être que ce petit intermède saura inspirer mes tourtereaux, ce soir.

Allusion mythologique dans la scène de danse de la saison 3 de La Chronique des Bridgerton

Rendez-vous à 26 minutes 38 secondes de l’épisode 4. Les convives assistent à un spectacle de danse classique mettant en scène un couple. Comme le signale la reine Charlotte, cet intermède chorégraphique n’est pas purement décoratif. La mosaïque qui sert de scène à la danse ne laisse d’ailleurs aucun doute sur l’histoire racontée et nous donne la clé d’interprétation. On y voit le dieu Amour -également appelé Cupidon ou Eros, reconnaissable à ses grandes ailes blanches – qui entoure de ses bras Psyché, reconnaissable aux ailes de papillon qui ornent ses épaules.

Le danseur Eros ou Amour dans la saison 3 La Chronique des Bridgerton La danseuse Psyché dans l’épisode 4 de la série Netflix La Chronique des Bridgerton La danse symbolique d’Amour et Psyché dans la série Netflix La Chronique des Bridgerton
Au début de cette scène, le danseur a des ailes dessinées sur son dos qui l’identifient au dieu Amour de la mosaïque. Psyché, incarnée par la danseuse, apparaît d’abord inanimée sur la scène jusqu’à ce qu’Eros la « réveille » ou plutôt la ressuscite. A la fin, le danseur hisse sur ses épaules Psyché qui déploie ses bras comme des ailes.

Un conte d’amour antique en écho avec l’histoire de Penelope Featherington

Ils ont l’air plutôt contrariés, non ?  Eros et Psyché en plein affrontement…

La peinture qui a inspiré la mosaïque de la scène de danse dans l’épisode 4 de la série La Chronique des Bridgerton, saison 3

Quels points communs entre la saison 3 de La Chronique des Bridgerton mettant à l’honneur le couple formé par Penelope Featherington et Colin Bridgerton et le conte d’Amour et Psyché ? Pour trouver quel sens donner à cette comparaison littéraire que Miss Cressida Cooper ne manque pas de relever, racontons brièvement l’histoire d’Amour et Psyché.

Si jamais vous souhaitiez ne pas être spoilé sur le conte et découvrir par vous-même l’histoire, je vous invite à vous arrêter là.

Ci-contre la peinture L’enlèvement de Psyché de William-Adolphe Bougeureau (1895) qui a inspiré la mosaïque de la scène de danse.


Il était une fois dans une ville un roi et une reine qui avaient trois filles d’une beauté très distinguée…

C’est ainsi que commence le Conte d’Amour et Psyché. Alors que ses deux sœurs aînées sont mariées depuis belle lurette, la princesse Psyché peine à trouver un époux (1er point commun avec Penelope !). La faute à sa beauté exceptionnelle qui l’isole du reste des mortels puisque les hommes bien loin de la courtiser préfèrent la vénérer comme une déesse… ce qui ne plaît d’ailleurs pas du tout à Aphrodite dont le culte est délaissé au profit de cette mortelle. En rage, elle demande donc à son fils, ce petit fripon d’Eros, d’agir : que Psyché tombe amoureuse d’un monstre, d’un vaurien, du plus misérable des humains ! Alors qu’il part à sa rencontre accomplir sa mission, Eros se laisse avoir à son propre jeu…

Peu de temps après, le Roi que la situation de sa fille désespère s’en va consulter un oracle duquel il revient désappointé et malheureux… Les dieux ont parlé : il devra mener sa fille au pic d’un roc pour « des noces sanglantes » et devenir l’épouse d’un monstre. Une fois menée au pic en question dans une procession aux accents funèbres plutôt que festifs, ses parents et tous leurs sujets repartent et la laissent seule rencontrer son monstrueux époux. Alors qu’elle pense sa dernière heure arrivée, un nuage la transporte avec douceur en contre-bas devant un palais somptueux.

peinture de Maurice Denis sur Psyché
Le Zéphir transporte Psyché sur une île de délices, peinture de Maurice Denis, 1908

Elle entre dans ce palais où tout y est étrange et magique. La nuit venue, elle entre dans la chambre et y attend son époux dans le noir le plus complet pour sa nuit de noces… Contre toutes attentes, Psyché découvre les joies de l’amour physique et chaque nuit, elle retrouve avec impatience et délices les bras de son époux. Seule ombre au tableau, son époux lui impose une condition à leur vie commune : Psyché ne doit jamais chercher à savoir qui il est, ni à quoi il ressemble. Elle accepte.

Le temps passe et Psyché se languit de sa famille. Elle souhaiterait également les rassurer sur son sort. Son mari accepte donc qu’elle reçoive ses sœurs, mais celles-ci ne sont pas aussi heureuses du bonheur de Psyché ni du luxe dans lequel elle vit, sans doute parce qu’il dépasse largement le leur. La jalousie pointe. Le tableau de bonheur conjugal que Psyché leur dépeint ne peut pas être aussi parfait… et si cet époux qu’elle ne peut voir était un monstre qui n’attend que le moment opportun pour la dévorer ?

peinture de Maurice Denis sur Psyché découvrant Eros
Psyché découvre que son mystérieux amant est Eros, peinture de Maurice Denis

Prise d’un effroyable doute, Psyché est prête à briser sa promesse. La nuit venue, elle attend la fin de leurs ébats amoureux et que son mari tombe dans un profond sommeil. Alors elle allume une lampe à huile et, en se penchant vers lui, découvre à sa grande stupéfaction que non seulement son mari n’est pas un monstre, mais qu’il est incroyablement beau. Sa main tremble et une goutte d’huile bouillante tombe sur l’épaule d’Amour qui se réveille en sursaut. Puisque le sceau du secret a été brisé, son mari lui révèle qu’il est le dieu Amour et que, comme la promesse n’a pas été tenue, leur histoire s’arrête ici. Sur ces paroles, Amour disparaît.

 

La trahison de Penelope Featherington dans La Chronique des Bridgerton et de Psyché dans le conte antique d’ApuléeDans ce conte, Psyché se rend donc coupable de trahison envers Amour en bravant un interdit qu’il avait clairement posé (voilà un 2e point commun : Colin prend ses distances avec Penelope quand il découvre qu’elle et Lady Whistledown ne font qu’une et qu’elle est donc l’autrice de la fameuse chronique qui a persiflé sur son compte et celui des Bridgerton). Après quoi, Amour s’enfuit et trouve refuge auprès de sa mère Aphrodite. Psyché, qui ne peut cependant se résoudre à abandonner, veut réparer sa faute et regagner l’amour de son époux (3e point commun !). S’ensuit pour elle un long chemin semé d’épreuves et d’embûches posées par la terrible Aphrodite qui mettent sa vie en danger. Alors qu’elle arrive au bout de ses peines, qu’elle est prête à réussir la dernière épreuve, elle commet une erreur et libère un sortilège qui lui ôte la vie.

Cupidon remis de sa blessure peut à nouveau battre des ailes. Il s’enfuit de sa chambre où l’avait enfermé sa mère Aphrodite qui ne supportait pas qu’il puisse donner son coeur à une mortelle et s’en va retrouver Psyché dont l’absence le faisait autant sinon plus souffrir que sa blessure. Il la retrouve inanimée, la libère du sortilège et la réveille, lui donnant ainsi l’opportunité de finir l’épreuve imposé par sa mère. Pendant ce temps, il s’en va de son côté demander à Zeus une faveur que sa mère ne sera jamais prête à accorder : son mariage officiel avec Psyché et son accession à l’immortalité.

sculpture de Psyché ranimée par le baiser de l’Amour d’Antonio Canova
Psyché ranimée par le baiser de l’Amour , sculpture d’Antonio Canova, 1793

Un conte d’amour revisité… et modernisé

Dans quelle mesure les showrunners de la série Netflix ont-ils souhaité filé la comparaison avec le conte d’Apulée ? Voici quelques autres similitudes que j’ai pu relever.

Colin Bridgerton dans le rôle de Cupidon. Au-delà du fait que Colin soit l’homme le plus convoité de la saison, il se pose en expert de l’amour et fait profiter un temps Penelope de ses leçons pour attirer dans ses filets des prétendants. Cependant, tout comme Cupidon dans le conte d’Apulée, il va dépasser les limites du rôle qu’il s’était donné…

Une histoire d’amour entre deux personnes de statut social différent. C’est plutôt un lieu commun des histoires d’amour dans la littérature, mais relevons-le quand même. Dans le conte d’Apulée, une histoire d’amour se noue entre une divinité et une mortelle. Cette liaison « contre-nature » est d’ailleurs rejetée comme telle par Aphrodite. Il faudra un mariage et même une apothéose de Psyché (c’est-à-dire un passage du statut de mortelle à celui de divinité) pour que cette relation soit acceptée. Dans La Chronique des Bridgerton, Colin fait partie d’une famille aristocrate de longue date, alors que les Featherington sont des parvenus embourgeoisés en mal d’intégration dans cette noblesse dont font partie les Bridgerton.

La beauté de Psyché et l’âme de Penelope. Si la série Netflix s’est autant plu à nouer des liens avec ce conte antique, c’est bien en raison du personnage de Psyché et de toute la symbolique qu’elle porte, puisque son nom, en grec ancien, signifie « l’âme ». Dans l’Antiquité, la beauté de l’âme se donne à voir dans la beauté du corps, c’est pourquoi Psyché qui a une belle âme est incroyablement belle. Dans La Chronique des Bridgerton de Netflix, l’enjeu est différent : l’âme et le corps sont dissociés, et ça, c’est une façon de penser très moderne. L’intérêt et l’amour que pourrait susciter chez quelqu’un une belle âme se heurtent à l’obstacle d’un corps jugé « disgracieux » par ses contemporains. Le regard pesant que porte la société sur Penelope dont le corps ne correspond pas aux canons de beauté classique lui impose une forme de silence et de retrait – elle est une candidate au mariage qu’on délaisse de la piste de danse, car d’emblée considérée comme hors-jeu – si bien que pour pouvoir exprimer le trésor d’intelligence qu’elle renferme, elle va créer de toutes pièces le personnage de Lady Whistledown à travers laquelle elle pourra briller. La beauté de l’âme de Penelope, son intériorité, son intelligence, son pouvoir d’analyse et d’observation, elle ne se sent autorisée à les exprimer que sous couvert d’un nom de plume.

Se cacher et se révéler. Cette réflexion nous amène à aborder le thème du dévoilement. Un inversement intéressant est opéré entre le conte antique et le conte moderne. Dans le conte d’Amour et Psyché, c’est le dieu Amour qui se cache, qui protège son identité avant que cette dernière ne soit découverte par Psyché, poussée par la curiosité. Dans La Chronique des Bridgerton, c’est Penelope qui se cache derrière Lady Whistledown et c’est Colin qui, poussé par la curiosité, va la suivre et découvrir qu’elle est l’autrice de ces écrits. En tout cas, dans les deux histoires, la révélation constitue le pivot de l’intrigue à partir duquel le conte de fées de départ semble prendre fin.

Le clin d’œil final au Conte d’Apulée : l’épisode 8, « En pleine lumière »

Et je me suis rendu compte que vous ne faites qu’une. Vous n’avez toujours eu qu’une seule voix. On ne peut pas vous dissocier de Whistledown (…) Et aujourd’hui, je n’arrive pas à croire (…) à la chance qui est la mienne de pouvoir me tenir à vos côtés et d’absorber ne serait-ce qu’un tout petit peu de votre lumière.

la scène des papillons dans l’épisode 8 de La Chronique des Bridgerton et l’allusion au conte d’Amour et Psyché

Abordons enfin la résolution du conte moderne de Netflix et du conte antique. Le conte d’Apulée se termine par l’apothéose de Psyché : elle acquiert l’immortalité et rejoint les dieux. Elle devient ainsi l’épouse légitime et incontestée du dieu Amour.

« Et je me suis rendue compte que vous ne faites qu’une ». À sa manière, le dernier épisode de la saison 3 se termine lui aussi en apothéose. Lors du bal organisé pour ses sœurs, Penelope n’a plus d’autre choix que de révéler à la reine Charlotte et à toute la société dans laquelle elle évolue qu’elle est Lady Whistledown. Contre toutes attentes, cette révélation ne provoque ni haine, ni reproche, mais, au pire, de l’indifférence et, au mieux, de l’admiration. Pour déclarer le bal ouvert, sa sœur demande de « lâcher les bestioles ». Et c’est là le dernier – et beau – clin d’œil au Conte d’Amour et Psyché, puisque la révélation est suivie d’un lâché de papillons, or Psyché est depuis l’Antiquité représentée avec des ailes de papillons…

fresque antique représentant Psyché avec ses ailes de papillon et Amour ou Eros avec ses ailes d’oiseau

 

Les Acharniens, Aristophane

Oeuvres complètes d’Aristophane, auteur de comédies

Bien qu’elle ne soit que la 3e pièce d’Aristophane, c’est bien la comédie Les Acharniens qui ouvre le 1er tome de ses Œuvres complètes, car la 1ère en date qui nous soit restée de son oeuvre. Les Acharniens, qui donnent le titre à cette pièce, sont les habitants du dème d’Acharnes, un bourg dépendant d’Athènes. 

Alors en pleine guerre du Péloponnèse qui oppose Athènes à Sparte, le charbonnier Justinet, habitant d’Acharnes, en a plus qu’assez et décide en douce de faire une trêve personnelle avec leurs ennemis pour retrouver toutes les joies de la paix : la bonne bouffe, la bonne chère, bien au chaud chez lui.

 Quand les Acharniens ont vent de la nouvelle, ils sont furieux, crient à la trahison et veulent s’en prendre à Justinet : leurs terres ont été ravagées par les Spartiates et ils comptent bien continuer à se venger. Mais à le voir si bien profiter de la vie, il se pourrait bien qu’ils flanchent et changent d’avis sur la question. 

Ce n’est pas la meilleure des pièces que j’ai pu lire d’Aristophane avec quelques traits d’humour obscène (même s’il ne faut pas s’en étonner de sa part) et une intrigue pas très poussée. Cette lecture est néanmoins intéressante pour ce qu’elle raconte de la guerre : les guerres longues se ressemblent toutes, quel que soit le siècle, avec ses privations, son commerce noir, ses délateurs, un désir de vengeance jamais étanché de ceux qui la subissent depuis des années et qui ont vu leurs biens détruits ou leurs proches tués.

J’ai trouvé également intéressantes les adresses « directes » d’Aristophane par l’intermédiaire de son personnage Justinet dans lesquelles il fait allusion au procès intenté par Cléon à Aristophane pour avoir médit d’Athènes et de sa politique dans ses précédentes comédies lors de fêtes accueillant des pays voisins. Ce qui vaut à Cléon, ce personnage politique de premier plan à Athènes, une détestation non déguisée de la part d’Aristophane, exprimée sans ambage sur la place publique et inscrite à jamais dans ses comédies.

Ariane, Jennifer Saint

Roman Ariane de Jennifer Saint, une réécriture du mytheDans ce roman sorti en 2023, Jennifer Saint déroule le fil de l’histoire d’Ariane, cette princesse crétoise dont le destin reste et restera à jamais intimement lié à la défaite d’un monstre et à la victoire d’un héros.

L’originalité de ce roman est que l’autrice dépasse des frontières du mythe en ne s’arrêtant ni au labyrinthe, ni à l’abandon d’Ariane par Thésée. Elle prend de la hauteur et dessine une fresque familiale. Jennifer Saint creuse ce qui fait la singularité d’Ariane en s’intéressant à ses liens familiaux : Ariane est la fille de Minos, un roi inflexible qui impose sa domination sur Athènes et dans son palais par la terreur, mais aussi la fille de Pasiphaé, une mère autrefois rayonnante, mais désormais effacée par le fardeau de la honte. Elle est la sœur de Phèdre, si différente d’elle, tellement plus déterminée qu’elle, mais aussi la sœur du Minotaure qui lui inspire honte, terreur et pitié.    

Jennifer Saint plonge également dans les profondeurs en sondant l’âme d’Ariane. Pourquoi une princesse crétoise se déciderait à trahir son père en laissant un prince grec détruire l’instrument de leur puissance ? N’était-elle vraiment mue que par un amour soudain pour Thésée ? Qu’aimait-elle à travers lui, que désirait-elle ? Quels espoirs secrets l’animaient ? 

Ce roman est un bel hommage rendu à un personnage mythologique assez effacé. Il est servi par une belle écriture et j’ai pris plaisir à le lire même si je n’ai pas été emportée et touchée comme j’ai pu l’être par les récits de Madeline Miller, et qu’il manque un peu de cette densité et de cette profondeur que j’ai trouvées dans Le Chant d’Achille. 

J’ai cependant grandement apprécié le fait qu’elle retrace la fresque familiale  à laquelle appartient Ariane. Cette princesse crétoise s’inscrit dans un tout et c’est en explorant ce tout qu’on peut approcher de ce qui fait la singularité de ce personnage. Les mythes grecs et toute la littérature qui par la suite s’en est inspiré avec des réécritures diverses et variées peuvent, en effet, un peu nous laisser confus sur la logique d’ensemble, sur les liens entre les différents personnages et la chronologie. Avec Ariane de Jennifer Saint, on retrouve une logique d’ensemble, une continuité entre différents mythes qui pouvaient nous paraître indépendants les uns des autres. L’histoire d’Ariane se raccroche au labyrinthe de Dédale et à sa fuite avec son fils Icare, mais aussi à celle de sa sœur Phèdre et de sa tragique histoire d’amour non réciproque avec Hippolyte ou encore à celle de Dionysos, un jeune dieu qui cherche à faire sa place parmi ses pairs. L’autrice s’est plu à tisser une histoire pleine d’autres histoires dans lesquelles Ariane est au coeur de certains mythes, dans la continuité et à l’origine d’autres. 

J’ai apprécié aussi le fait qu’elle fasse ressortir certains motifs, qu’elle fasse apparaître certaines logiques. Je pense notamment à ce qui est arrivé à Ariane, c’est-à-dire son abandon par Thésée, et qui est expliqué par un précédent, c’est-à-dire l’abandon de Médée par Jason. Dans chacune des deux situations, un héros grec se fait aider par une princesse barbare prétendument aimée, puis abandonnée. Enfin j’ai trouvé la psychologie des personnages intéressante. Jennifer Saint se concentre essentiellement sur la psychologie des deux sœurs, Ariane et Phèdre, dont les caractères et les vies s’opposent et auxquelles la romancière donne la parole à tour de rôle. C’est d’ailleurs un aspect du roman que j’ai beaucoup apprécié. 

Echidna, la mère de tous les monstres

Nous voilà atterris par magie au pays des Arymes. Dans les entrailles des montagnes de la Cilicie, en Troade. Là où le monde d’avant a commencé, celui des monstres. Quand Zeus n’avait pas encore détrôné son père Cronos qui lui-même n’avait pas encore détrôné son père Ouranos. Seule la magie pourra nous sortir de là. Nul ne pourra nous sauver à part elle car personne n’a jamais trouvé l’emplacement du pays des Arymes.

A peine échangeons-nous quelques mots qu’une vague inquiétude nous gagne. Nos voix ricochent sombrement en échos sur les parois. Les échos sont partis annoncer que nous sommes là. Nos cheveux se dressent sur nos têtes quand, quelques secondes après le dernier écho, nous entendons au loin un sifflement lugubre, suivi du bruit d’un corps rampant que nous devinons immense. Nous suivons sa progression à ses écailles qui râpent le sol et charrient à sa suite les rochers. Nos cœurs se décrochent presque de notre cage thoracique quand nous voyons des ombres ondulantes jaillirent sur les parois.

Peu après surgit à la lumière de nos torches la fille du Chaos, la vipère des premiers temps, la mère de tous les monstres, Echidna. Nos cœurs s’arrêtent de battre un instant. Nous voyons d’abord ses deux mains de géant s’agripper aux hauteurs de la grotte, puis sa tête à la chevelure noire en frôler la cime et enfin son torse. Sa beauté de femme est étrange et ensorcelante et son regard a la profondeur du Chaos. Elle pose ses mains au sol et fait venir à elle sa queue de serpent qui s’enroule autour d’elle avec la tranquillité et la puissance d’un fleuve. Nos regards hypnotisés s’attardent sur ses écailles dont les couleurs changent au flamboiement dansant de nos torches.

Echidna est une créature si sublime et terrifiante que personne n’ose prendre la parole. Elle ne montre pas les crocs, elle semble attendre. Elle a accepté notre invitation. Nous voulons qu’elle nous parle de ses enfants, ceux qu’elle a eus avec Typhon.

L’Antre des Louves, Elodie Harper

Couverture du roman L'Antre des Louves, d'Elodie HarperParu en 2022, L’Antre des Louves est le premier roman d’Elodie Harper. Une plongée dans la célèbre cité antique de Pompéi pour le moins original puisque l’histoire se déroule dans un lupanar, les maisons de prostitution de l’époque.

Pompéi, 74 avant J.-C.

Alors qu’il y a peu encore, elle était libre et fille de médecin dans une petite ville grecque paisible, Amara se retrouve à devoir marchander son corps au lupanar de L’Antre des Louves, à Pompéi.

Dans le petit microcosme du lupanar, Amara va devoir faire sa place entre un maître cruel à souhait et ses comparses qui, chacune, supportent sa douleur différemment.

Depuis qu’elle a passé le seuil de L’Antre des Louves, Amara n’a qu’un souhait : forcer la chance et faire dévier le cours de son destin, même si ce n’est pas chose aisée quand on est une femme dont la bonne ou mauvaise fortune est soumise à la volonté des hommes. Pour vivre une vie meilleure que celle qui lui est offerte par le lupanar, elle n’a d’autre choix que de feindre, mentir, manipuler, mais aussi de renoncer.

L’Antre des Louves a été une bonne lecture et un roman agréable à lire. Au cours de ma lecture, je pensais ne pas m’être tant attachée aux personnages jusqu’à ce que le sort de l’un des personnages vers la fin du roman ne m’arrache quelques larmes. On se prend donc assez rapidement à l’intrigue et je me laisserai sans doute un jour tenter par sa suite La Maison à la porte dorée !

Le Cyclope, Euripide

Les tragédies d’Euripide, volume 1

Parmi les très rares drames satyriques qui nous sont restés, il y a Le Cyclope. Euripide y revisite avec facétie un célèbre épisode de l’Odyssée d’Homère où Silène et ses satyres seraient de la partie… 

Le tout jeune dieu Dionysos a été enlevé par des pirates. Ni une, ni deux, son protecteur, Silène, et ses ouailles, les satyres, prennent la mer pour partir à sa recherche et le sauver. Mais leur navire fait naufrage et les créatures de Dionysos se retrouvent sur l’île aux Cyclopes. L’aventure pourrait s’arrêtait là si cette joyeuse compagnie n’était devenue l’esclave du cyclope Polyphème. Tous les spectateurs qui connaissent l’histoire originelle sur le bout des doigts attendent de voir à quelle sauce Euripide va revisiter l’arrivée d’Ulysse sur l’île et ce qu’il adviendra de ces compagnons qui ne jurent que par le vin et autres plaisirs.

 

Alceste, Euripide

Les tragédies d’Euripide, volume 1Au lieu d’un drame satyrique, Euripide propose à ses spectateurs une petite étrangeté, la pièce Alceste, une tragédie à fin heureuse dans laquelle le roi Admète, époux d’Alceste, ne brille pas par sa noblesse d’âme.

Pour s’être vengé du meurtre de son fils Asclépios en tuant les Cyclopes qui fabriquent les foudres de Zeus, l’arme responsable de sa mort, Apollon a été puni par Zeus à servir pendant un certain temps le roi Admète. En reconnaissance de son hospitalité, Apollon lui évite sa mort imminente en s’arrangeant avec les Parques. Mais en échange, Admète doit trouver quelqu’un pour mourir à sa place…

Peut-on demander à quelqu’un de mourir à sa place sans être égoïste et lâche ? Une vie en vaut-elle mieux qu’une autre ? Les parents ont-ils un devoir de sacrifice ? Voilà une petite pièce qui ne laisse pas indifférent et un personnage, Admète, qui inspire au lecteur des sentiments bien loin de ceux auxquels on s’attend en lisant une tragédie : dégoût, incompréhension, jugement.

Médée, Euripide

Les tragédies d’Euripide, volume 1Euripide, misogyne ? Accusation un peu facile quand on sait que, dans ses pièces et surtout dans Médée, les femmes, conscientes de l’injustice qu’elles subissent, sont loin d’être des oies blanches. Soit elles se contentent de sauver leur peau, comme Andromaque, soit elles se vengent, comme Hécube ou Médée… D’ailleurs, dans cette pièce, ne vous étonnez pas que Jason n’ait pas l’étoffe d’un héros. Euripide en a fait un salaud.

Médée est une magicienne redoutable qui traîne derrière elle une réputation sulfureuse. Femme savante, intelligente, puissante, Médée inquiète. Sans elle, Jason n’aurait jamais pu récupérer la toison d’or, ni sortir vivant de sa quête. Pour le suivre, elle a dû trahir sa famille, sa patrie et se rendre coupable d’un meurtre qui lui interdit tout retour. Après plusieurs années de vie commune et après avoir fondé une famille, Jason lui fait l’affront de la quitter pour une autre.

Si Médée n’était qu’une femme comme les autres, il lui aurait fallu subir et souffrir sans souffler mot l’insulte et l’humiliation, observer avec regret la somme des sacrifices qu’elle n’aurait jamais dû faire pour un homme. Mais Médée n’est pas une mortelle comme les autres. Jason l’apprendra à ses dépends. Sa nourrice ne le sait que trop bien, elle qui dira

Je la connais bien et je la redoute. Elle est terrible. Et qui s’en prend à elle aura fort à faire avant de chanter victoire.

J’ai eu le courage de ce qu’aucun mortel n’a jamais fait sur terre

le roi de Troie, Priam, suppliant Achille de lui rendre le corps de son fils, Hector

Pour venger la mort de Patrocle, le héros grec Achille tue le prince troyen Hector. Mais sa mort n’ayant épuisé ni sa rage, ni son chagrin, il fait subir à son cadavre des sévices quotidiens. Au péril de sa vie, le roi de Troie, Priam, descend de son trône, traverse le camp ennemi et vient s’agenouiller devant son pire ennemi pour lui faire une prière, non pas en qualité de roi, mais de père. 

Priam se dirigea tout droit vers l’habitation, à l’endroit où se plaisait à s’asseoir Achille aimé de Zeus. Il le trouva chez lui. Ses compagnons restaient assis à distance. Deux seulement, le héros Automédon et Alcimos rejeton d’Arès, près de lui s’affairaient. Il venait depuis peu d’achever son repas, ayant mangé et bu. La table était encore dressée auprès de lui.

Le grand Priam entra sans être vu par eux, s’arrêta près d’Achille, de ses mains lui saisit les genoux, et baisa les mains cruelles, meurtrières qui lui avaient immolé tant de fils. De même que, lorsqu’un homme, victime d’un irrésistible égarement, après avoir commis un meurtre en sa patrie vient se réfugier chez un peuple étranger, auprès d’un homme riche, la stupeur s’empare de tous ceux qui le voient ; Achille, de même, resta stupéfait à la vue de Priam semblable à un dieu. Stupéfaits aussi furent ses compagnons, et les uns cherchaient les autres du regard.

Priam alors, en suppliant Achille, lui adressa ces mots :
– Souviens-toi de ton père, Achille, semblable aux dieux ; il est du même âge que moi, sur le seuil ruineux de la vieillesse. Il se peut que les voisins qui l’entourent l’accablent aussi, et qu’il n’ait personne pour écarter de lui la ruine et le désastre. Mais lui cependant, en apprenant que tu vis, se réjouit en son coeur, et il espère, au cours de chaque jour, voir son cher fils revenir de Troade. Quant à moi, je suis au comble du malheur, car j’avais engendré dans la vaste Troade les fils les plus vaillants, et je dois avouer qu’aucun d’eux ne me reste. J’en avais cinquante, quand sont venus les fils des Achéens. Dix-neuf sortaient du même ventre, les autres, en mes demeures m’étaient nés d’autres femmes. De la plupart, l’impétueux Arès a brisé les genoux, et celui qui pour moi était unique, qui protégeait la ville et ceux qui l’habitaient, tu me l’as tué récemment, tandis qu’il combattait pour sauver sa patrie ; c’était Hector. Et maintenant, c’est pour lui que je viens vers les nefs achéennes, pour te le racheter, et je t’apporte des rançons innombrables. Or donc, Achille, respecte les dieux, et prends pitié de moi en songeant à ton père. Je suis encore plus à plaindre que lui, et j’ai eu le courage de ce qu’aucun mortel n’a jamais fait sur terre : porter jusqu’à ma bouche la main de celui qui tua mon enfant.

Ainsi parla-t-il, et il suscita chez Achille le désir de pleurer sur son père. En le touchant de la main, il écarta doucement le vieillard. Tous deux se souvenaient : l’un, songeant à l’homicide d’Hector, pleurait à chaudes larmes, prostré aux pieds d’Achille. Achille pleurait son père, parfois aussi Patrocle. Leurs plaintes s’élevaient à travers la demeure. Lorsqu’il se sentit saturé de sanglots, et que le désir en eut quitté ses entrailles et ses membres, le divin Achille se leva brusquement de son siège et redressa le vieillard en le prenant par la main, saisi de compassion pour sa tête chenue et son menton chenu.